Kate Moss on Body Armour, 2013
Image courtesy the artist. © Allen Jones
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“69, année érotique” chantaient Jane Birkin et Serge Gainsbourgh.
1969 est aussi l’année des « meubles fétiches » qu’Allen Jones a produits : le Hat Stand, Table and Chair. Des
représentations féminines à quatre pattes et grandeur nature habillées en tenue
bondage qui sont aussi animées que des mannequins de vitrine, servant véritablement
de table basse. Deux Table accueillent
le visiteur pour cette exposition d’Allen
Jones RA à la Royal Academy of Arts.
Ces trois œuvres fades et impersonnels évoquant l’érotisme standardisé ont défini,
moulé et « condamné » Allen Jones tout au long de ses cinquante années
de carrière artistique.
Une malchance alors qu’il produisait son travail en même temps que le féminisme
s’émancipait. Certaines de ses expos ont subi le blocus d’activistes féministes
comme aujourd’hui certains activistes antiracistes bloquent l’exposition Exhibit B.
Table, 1969
Image courtesy the artist. © Allen Jones
Etant moi-même une féministe à mi-temps, je ne me suis pas forcement sentie
très à l’aise la première fois que j’ai vu sa Chair et je n’ai pas cherché à creuser davantage son travail. J’ai
relevé le défi et rejoint la présentation presse à la RA, quelques semaines plus tôt.
Ce vétéran de la pop britannique, Allen Jones, est-il un artiste qui
chosifie la femme ou un artiste controverse se servant des femmes pour pointer
du doigt l’image qu’en fait la société de consommation ?
Allen Jones a étudié à la Royal College of Art, à Londres dans les années 60. Parmi les étudiants
de cette époque se trouvaient David
Hockney RA, Patrick Caulfied, Derek Boshier, Peter Phillips RA et Ron
Kitaj. Leurs images discordantes étaient une réappropriation de la culture
populaire, transformant le banal en images contemporaines vibrantes : un
nouveau langage visuel naissait alors qu’ils utilisaient des figures humaines
au centre même de leur travail. Dans le récent documentaire Hockney, David explique ce besoin de rompre
avec le conventionnel.
Allen Jones s’est rendu pour la première fois aux US en 1964-65 où il
s’abreuvait d’artistes comme Roy
Lichtenstein, Andy Warhol, Tom Wesselmann, Ed Ruscha et Mel Ramos.
Dès le début de sa carrière, il s’acoquinait avec Roman Polanski, The Beatles,
Elton John, Johnny Rotten ou encore Adam
Ant.
Exhibition general view of a room
Très clairement, Allen Jones n’avait aucune intention de produire des
boites de soupe à l’infini à partir de cette culture populaire. Son inspiration
d’alors et d’aujourd’hui puise dans sa fascination pour les femmes ; leur façon
d’être représentée dans les masses medias tout en véhiculant un message ambigu.
Son intention n’était pas de choquer le public, mais plutôt de choquer le monde
de l’art. Il est plus facile de s’identifier à une sculpture humaine hyper réaliste
plutôt qu’à une chose « artifier » empruntée à la société de
consommation. Le débat s’épice du coup beaucoup plus…
Stanley Kubrick avait d’ailleurs bien compris son travail
transgressif, mais n’a pas su convaincre Allen
Jones du prêt de ses œuvres pour A
Clockwork Orange. Le metteur en scène Kubrick a alors reproduit le style
Pop de Jones pour son film.
Pareil aux images d’érotisme subtil d’Erwin
Blumenfeld, Allen Jones créait
une femme sensuelle mais inaccessible semblable à celle récemment produite de Kate Moss. Alors que les femmes de
Blumenfeld sont réelles, celles de Jones sont des constructions psychologiques,
des appareils… enracinées dans le monde réel de l’obsession ou du
sadomasochisme. Comme Egon Schiele,
il exagère l’utilisation des couleurs non réalistes ou des corps démembrés,
mais à l’inverse de Schiele, Jones nourrit son appétit pour la consommation vénimeuse.
Cette rétrospective retrace le développement du processus et des idées
artistiques de Jones. Elle se compose de plus de 80 travaux et présente des
exemples de ses peintures et sculptures du début à aujourd’hui. On y voit des
dessins rarement vus et des maquettes sculpturales.
Il se peut qu’Allen Jones interpelle le visiteur / voyeur et qu’il le force
à réagir. Il se peut qu’Allen ne soit pas misogyne et qu’il s’amuse de ce que la
culture médiatique fait des femmes… je suis sortie et mon cerveau s’est accroché
à un poème de Paul Verlaine « Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant
d’une femme inconnue et que j’aime et qui m’aime et qui n’est chaque fois ni
tout à fait la même, ni tout à fait une autre et m’aime et me comprend... son
regard est pareil au regard des statues, et, pour sa voix, lointaine, et calme,
et grave, elle a l'inflexion des voix chères qui se sont tues. »
Allen Jones RA - Burlington Gardens - 13 novembre 2014 – 25 janvier
2015 @ Royal Academy of Arts, Burlington Gardens, London W1S 3ES
Dates and Opening Hours
Open to public: Thursday 13
November 2014 – Sunday 25 January 2015 - 10am – 6pm daily (last admission
5.30pm) - Fridays until 10pm (last admission 9.30pm)
Admission
£11.50 full price (£10 without
Gift Aid donation); concessions available; children under 16 and Friends of the
RA go free.
www.royalacademy.org.uk - @royalacademy #AllenJones
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