Corset by Detolle for Mainbocher
Artist: Horst P Horst
Date: 1939
© Conde Nast / Horst Estate
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« Je sens une grâce apaisante dans
ton travail remarquable – d’autant plus aujourd’hui où nous vivons une époque
bombardée de toute part par les clichés instantanés » Lisa Fonssagrives, 1976.
Robert Mapplethorpe, Louise Maisons (voir lien article
en anglais plus bas), Herb Ritts, Bruce Weber, Madonna, Siouxsie & The
Banshees et même le film Le Diable s’habille
en Prada ont rendu hommage au travail de Horst P Horst.
Qui est Horst P Horst ?
Horst P Horst est
né Horst Paul Albert Bohrmann en 1906 à Weiβenfels-an-der-Saale, La Thuringe,
en Allemagne. Ses parents sont des protestants bourgeois qui, malgré les dures épreuves
de la Première Guerre Mondiale lui payent des études de charpentier et de dessinateur
de meubles à l’Ecole d’Art Appliqué de Hambourg (Kunstgewerbeschule). En 1930, Horst part à Paris pour y devenir l’élève
apprenti de Le Corbusier, architecte
et dessinateur de meubles. Grâce à celui-ci, il rencontre George Hoyningen-Huene et emménage très vite dans son appartement
chic parisien et devient à la fois son élève en photographie et son amoureux.
Entre 1931 et
1992, lorsque sa vue s’affaiblit, Horst
est l’un des photographes les plus importants du XX Siècle. Il est non
seulement responsable d’un grand nombre de couvertures pour Vogue en France, en Amérique du Nord,
au Royaume-Uni, en Italie, etc. et publie également pour le magazine House & Garden et autres livres et
magazines de photos. Horst meurt dans sa demeure aux Etats-Unis en 1999.
Muriel Maxwell, American Vogue
Artist: Horst P Horst
Date: 1939
© Conde Nast /
Horst Estate
V&A - Horst: Photographe de Style
Jusqu’au 5
janvier 2015, le Musée V&A du « quartier Français » de South
Kensington à Londres présente une des plus importantes rétrospective du travail
photographique de Horst P Horst. Un travail qui s’inscrit aussi dans le monde de
l’art, la Haute Couture, le théâtre et la société mondaine.
L’exposition Horst: Photographer of Style comporte
250 photographies, des vêtements de Haute Couture, des magazines, des images d’archive
et des objets. Chaque salle est une dédicace des amitiés intenses et durables
de Horst avec Coco Chanel et Elsa Schiaparelli ; Marlene Dietrich et Noël Coward ; Salvador Dalí et Jean-Michel
Frank etc. Au point culminant de l’exposition, on y trouve une plateforme
de plus de 90 couvertures devenues rarissimes de Vogue par Horst.
Certains aspects
moins connus de son travail y sont également révélés, comme sa série d’hommes
nus, ses voyages au Moyen Orient ou en Amérique Latine. On y trouve son
processus créateur telles ses planches contacts, ses dessins ou ses appareils
photo. Notamment, celles de sa photo la plus connue : Le Corset Mainbochet. L’exposition explore ses sources d’influence
qu’elles soient Classiques, Bauhaus ou Surréalistes dans le Paris des années
30.
Les magazines de mode au début du XX Siècle
Le Péruvien Reynaldo Luza (voir lien article en
anglais plus bas) était un des illustrateurs de mode les plus réputés pour Vogue et Harpers Bazaar jusqu'à ce que ces magazines changent de format pour
privilégier uniquement la photo de mode dans les années 30. George Hoyningen-Huene était considéré
comme le grand maitre de la photo de mode et du corps humain dans les années 20
et 30 : la culture du corps était le passe temps tendance avec le sport,
l’air de la nature et les « bains de soleil ». Lorsque les Etats-Unis
ont souffert la Grande Dépression des années 30, le monde de la mode
représentait une échappatoire pour ceux qui se projetaient dans ses pages au
papier glacé de Harpers Bazaar ou de
Vogue. Malgré cette époque sombre,
le nombre d’abonnements à ses publications avait grandement augmenté.
De façon
incontestable, le Paris des années 30 était la capitale de la mode. Horst était
très méticuleux quant au positionnement du corps de ses modèles, mais aussi du
textile. Les poses étaient empruntées au classique et la plupart des photos en
noir & blanc restaient minimalistes. Pour « vendre » de
l’illusion, Horst pensait qu’il ne fallait pas rajouter d’éléments s’inscrivant
dans la réalité, sinon le lecteur perdait cette sensation de rêve.
Mode... élégance...
Pendant l’hiver
1930, Horst et Hoyningen-Huene voyagent au Royaume-Uni pour s’abreuver de musées
d’art, mais surtout pour y rencontrer le tout premier photographe de Vogue, Cecil Beaton. De ce voyage, Horst dira « La seule vraie élégance masculine est Anglaise ». Pour lui, la
mode n’est qu’un prétexte pour pouvoir façonner les corps, construire un
paysage, jouer avec les formes et les textures… il réécrit la lumière d’une
pièce, il la traduit même. Il est l’architecte du corps des femmes, un maître
des jeux d’ombres, un œil dramatique et romantique qui sculpte au
scalpel ! L’élégance est au-dessus de tout.
Son humour gris
et ses photos sombres provoquent souvent des vagues houleuses avec le personnel
de Vogue. Edna Woolman Chase, éditeur en chef de Vogue entre 1914 et 1952,
envoie une note à la ronde en 1937 : « Je viens de réprimander Horst à propos du manque de lumière dans ses
photos. Il faut absolument que nous cessions d’accepter ce désir de la part de
nos photographes à tout voiler dans le mystère le plus absolu. »
Lui, il préfère
se concentrer sur les points importants d’une robe plutôt que ceux d’un visage.
Les visages, contrairement à ceux des statues grecques qui étaient faits pour
être exposés à la lumière du soleil, sont plus complexes à exposer sous la
lumière des projecteurs de studio – soit la lumière expose les rides, soit elle
laisse un œil au beurre noir. Horst favorise la subtilité de l’angle d’un
visage.
Installation dans la salle Haute Couture
(c)Victoria and Albert Museum, London
Coco Chanel
Reconnue pour
avoir libéré le corps des femmes de leurs lacets et corsets, Coco redonne à ces corps une allure
plus sportive après la Première Guerre Mondiale. Unique en son genre parmi la
Haute Couture parisienne souvent austère à l’aube de la Seconde Guerre
Mondiale, elle revigore la femme en l’affûtant d’un look nonchalant mais
élégant – voir les vêtements en exposition dans la salle « Haute
Couture » avec Lanvin, Molyneux, Schiaperelli, Vionnet,
etc.
Une des photos
préférée de Coco – dans la même salle – est celle que Horst a prise d’elle
lorsqu’ils se sont rencontrés à New York en 1937. Il n’a jamais voulu lui faire
payer les impressions qu’elle lui avait commandées. En signe de reconnaissance,
elle lui offre quelques meubles de sa propre collection. Pendant trois décennies,
Coco et Horst collaborent ensemble et il dira d’elle : « Sans aucun doute, le centre du cercle, la
star du cirque, c’est Chanel »
Seconde Guerre Mondiale... Amitiés
En dépit de son
évolution parmi les riches et le luxe, Horst se permet une série de quatre
photos – dans la pièce Surrealism –
au titre « Beauté Electrique / Electric Beauty » Si les années 20 ont
permis aux gens de s’occuper plus de leurs corps, Horst pense qu’à la veille de
la guerre, ces traitements extrêmes étaient futiles. Sa série est un regard
satirique sur les salons de beauté.
En août-septembre
1939, après avoir rencontré Cartier
Bresson et Dali, il photographie
les dernières collections parisiennes, dont notamment sa photo la plus connue
et mystérieuse Le Corset Mainbocher
de Detolle. La vie de bohème
parisienne prend fin lorsque la plupart des artistes fuient Paris. Horst lui-même embarque pour la dernière
traversée de l’Atlantique sur le Normandie
vers New York, où il travaillera pour Vogue.
Malheureusement,
l’entrée en guerre des Etats-Unis ne favorise pas sa situation en tant
qu’Allemand et il lui est très difficile de travailler. En été 1943, il
s’engage dans l’armée Nord Américaine et devient citoyen Etatsunien. Il profite
de cette opportunité pour changer son nom
Horst Paul Albert Bohrmann à Horst P
Horst. Détestant l’uniforme, l’éditeur en chef de Vogue Edna Woolman Chase (le mémo sur les
photos sombres) parvient à faire réduire son service et le fait entrer dans les
murs de Condé Nast. L’exposition
accueille ses deux étiquettes d’armée en acier où il y figure le nom d’Edna en
tant que sa parente proche.
Une zone d’ombre
plane sur sa relation avec sa famille et ses amis en Allemagne alors qu’il est
évident que pendant toute sa carrière, Horst noue des liens très forts avec les
personnalités qui l’entourent, qu’ils soient mannequins, rédacteurs en chef, dessinateurs
de mode, etc. La liste est longue, mais parmi les photographies de
l’exposition, on y trouve au travers des salles Haute Couture – Surrealist –
Stage & Screen – Travel – Pattern from Nature – Studio – Fashion in Color –
Living in Style – Nudes : Lyla Zelensky,
Princess Karam Kapurthala, Lee Miller, Ludmila Leonidovna Feodoseya, Sonia
Colmer, Helen Bennett, Cora Van Millingen, Agnetha Fisher, Lisa Fonssagrives,
Salvador Dali, Luchino Visconti, Marlene Dietrich, Bette Davis (assise dans
une chaise géante), Mistinguette, Ginger
Rogers, Vivien Leigh, Jessica Tandy (née à Hackney en 1909)… George Hoyningen-Huene lui léguera sa
collection de photos à sa mort.
View of ruins at the palace of Persepolis, Persia
Artist: Horst P Horst
Date: 1949
© Conde Nast / Horst Estate
Voyages et formes hallucinogènes
Alors que le
gratin des célébrités se « réfugie » à Rome pour y vivre les moments
délicieux de la Dolce Vita au
lendemain de la Seconde Guerre Mondiale (voir lien article ci-dessous), Horst
voyage au Moyen Orient, en Amérique Latine et sur les côtes Pacifique et
Atlantique avec Valentine Lawford. Ils
se rencontrent en 1947 et forment un couple jusqu'à la mort de Valentine en
1991. Les deux pièces « Travel et
Pattern from Nature »
contiennent des photos très peu connues de ces voyages. On y trouve également une
lettre touchante de l’éditrice en chef pour Harpers Bazaar, Diana
Vreeland qui s’exprime au sujet de ses photos exquises.
En ce qui
concerne les photos à caractères hallucinogènes, je soupçonne Horst d’avoir
pris des concoctions de liane ou des potions de cactus pour visionner ces
formes prises au Mexique a partir d’arbre – qui sont par ailleurs des études
photographiques de l’art contemporain en Amérique Latine. Ces reproductions à
répétitions ont servi de schémas pour des impressions sur textile et autres objets
d’art. Malheureusement, ils sont si rares, me dit un chercheur au V&A qu’il est difficile de les
localiser. Si quelqu’un connait le ou les propriétaire(s)… faites le savoir
SVP.
Installation dans la salle Fashion in Color
(c)Victoria and Albert Museum, London
La vie en couleur
A partir du XIX
Siècle, seuls ceux qui peuvent se permettre d’expérimenter les techniques
couleurs en photographie s’amusent avec la chimie. Ce n’est qu’à partir des
années 30 que la photo couleur devient plus accessible mais reste malgré tout
une technique en développement. Il faut un diaphragme totalement ouvert et un
temps d’exposition relativement long pour capturer une image, ce qui demande au
mannequin une position immobile assez longue et rend parfois une image
légèrement floue. Malgré cette difficulté, Horst
réussit des photos de mode aux allures architecturales et produit 94
couvertures de Vogue entre 1936 et
1963 – en exposition sur une plateforme qui traverse la salle Fashion In Color entourée de larges photos
en couleur.
Les incontournables de l’exposition
L’appareil photos
« dinosaure » de studio des années 40, Ansco et sa valise contenant des plaques photographiques.
La collaboration
Horst et Dali dans la salle Surrealism
– les autres photos surréalistes me semblent plus êtres des études qu’un
travail abouti.
Les photos
d’hommes nus (la dernière salle, Nudes)
est un véritable travail sur la lumière, les ombres et les formes. Cette
collection a été exposée à Paris en 1953 et appartient aujourd’hui au couple Elton John / David Furnish. De cette collection, Mehemed Agha, directeur artistique pour Vogue, disait à l’époque : « Horst prend la glaise inerte de la chaire humaine et la transforme en
formes décoratives à partir de sa propre conception. Chaque geste de ses
poseurs est planifié, chaque ligne est contrôlée et coordonnée dans
l’intégralité de l’image. Si les gestes semblent naturels et dénudés de
précision, c’est parce qu’ils sont en fait répétés avec une infinie précision ;
les autres, comme le dieu de Voltaire, ont été inventés par l’artiste parce
qu’ils n’existaient pas. »
Horst: Photographer of Style n’est pas seulement une exposition de photographie... c’est une leçon de
patience et d’étude attentive des formes et des lignes. Une véritable relation
entre le poseur et un homme qui aurait dû être charpentier…
Pour la petite
histoire, Horst a eu sa première exposition en Allemagne en 1987 alors qu’il
avait 81 ans !
Heures ouvrables
du musée
10h00 à 17h45
tous les jours - 10h00 à 22h00 tous les vendredis (certaines galeries restent
ouvertes après 18h00) - Fermé du 24 au 26 décembre
L’entrée du
tunnel située à la station de métro South Kensington, pour accéder au V&A, est ouverte de 10h00 à 17h30
tous les jours, mais peut être fermée, à l’occasion, sur demande du Métro
londonien.
Billets
L’exposition est aménagée
par Susanna Brown, Curator des
photographies au V&A
L’exposition a
été montée grâce à : The Horst Estate ;
R. J. Horst ; The Condé Nast Archive à New York ; et la Collection de Vogue Paris. Il y aussi des photographies et
des articles de Haute Couture appartenant à la collection du V&A.
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Plus d’info =
Adresse :
Victoria
and Albert Museum, Cromwell Road, London SW7
Ne pas hésiter a me contacter a l’adresse ci-dessous si vous voulez
paraitre dans les colonnes de Babylondorbital – un événement culturel à Seoul
ou Londres ou Hanoi… j’étudierai votre cas ! Sybille Castelain = babylondonorbital@gmail.com
Billets référence en anglais :